Dormir dans une chambre où la température est élevée est difficile. Une étude qui vient de paraître dans Nature communication Global warming may increase the burden of obstructive sleep apnea alerte sur les effets possibles sur les apnées du sommeil.
Les données proviennent de 116 620 utilisateurs réguliers d’un capteur de sommeil sous-matelas certifié FDA (Withings Sleep Analyzer), permettant l’enregistrement de plus de 62 millions de nuits sur 3,5 ans. Le capteur mesure les apnées et hypopnées (calcul de l’IAH), la durée du sommeil et d’autres variables par balistographie et enregistrement sonore. Les températures ambiantes (moyenne sur 24 h) ont été obtenues via les réanalyses climatiques ERA5 du service Copernicus.
Résultats principaux
-
Lien température/SAOS (apnée obstructive du sommeil) :
-
Le risque de présenter un SAOS modéré à sévère (IAH ≥ 15) augmente de 45 % lors des journées les plus chaudes (99e percentile, 27,3 °C) par rapport aux journées fraîches (25e percentile, 6,4 °C).
-
Ce risque atteint +49 % pour le SAOS sévère (IAH ≥ 30).
-
L’effet est plus marqué chez les hommes, les personnes ayant un IMC élevé, et celles dormant plus de 6 heures par nuit.
-
-
Impact sanitaire en 2023 :
-
L’augmentation liée au réchauffement climatique en 2023 a été associée à une perte de 788 198 années de vie ajustées sur l’incapacité (DALYs) dans 29 pays. (DALY = représente les années de vie ajustées sur l’incapacité c’est une mesure standardisée employée par les études sur la charge mondiale de morbidité (GBD)32 qui capture l’impact combiné de la maladie, des blessures et de la mortalité prématurée, pour quantifier le bien-être et le poids sociétal dus à la prévalence accrue du SAOS en lien avec les températures élevées).
-
Cette perte inclut 27 180 années de vie perdues et environ 761 000 années vécues avec handicap.
-
Coût économique associé au poids socioéonomique du SAOS : 98 milliards de dollars (68 Md$ pour la qualité de vie, 30 Md$ en productivité perdue).
-
-
Projections futures (2100) :
-
Si le réchauffement dépasse +1,8 °C, la charge du SAOS pourrait être multipliée par 2 à 3, entraînant 16 à 47 millions de DALYs supplémentaires et jusqu’à 2,8 de milliers de milliards de dollars de pertes économiques globales.
-
Lien entre la température ambiante et les apnée obstructive du sommeil selon la zone géographique.
Cette figure illustre clairement la relation dose-réponse entre la température moyenne sur 24 h et la probabilité de SAOS (modéré et sévère). Elle montre une augmentation exponentielle du risque à partir de 20 °C. Cette courbe synthétise visuellement l’effet global du réchauffement sur le SAOS.
Analyse critique des conclusions
Points forts :
-
Énorme volume de données sur la durée (plus de 62 millions de nuits).
-
Utilisation de mesures objectives continues de l’IAH.
-
Modélisation robuste avec ajustement sur la saisonnalité, les particules fines, l’humidité, etc.
-
Scénarios climatiques futurs bien intégrés avec les données de l’IPCC.
Limites :
-
Biais socio-économique : Les participants sont majoritairement issus de pays développés et équipés d’un dispositif connecté. Ils ont probablement un meilleur accès à la climatisation et à un habitat isolé. Les indicateurs font références à des modèles qui peuvent être discutables.
-
Température réelle inconnue : seules les températures extérieures ont été utilisées, sans accès à la température dans la chambre à coucher ni à des mesures d’exposition individuelles. Quand les températures sont régulièrement élevées, il y a une adaptation du sommeil.
-
Données incomplètes : 9,4 % des nuits ont été exclues pour durée de sommeil < 5 h, ce qui pourrait sous-estimer l’effet (puisque la chaleur raccourcit le sommeil).
-
Absence de données cliniques : aucune information sur la somnolence diurne, les comorbidités, ni le traitement éventuel des patients.
-
Représentativité limitée : 77 % d’hommes, peu de données dans les pays en développement, très faible couverture en Afrique et Asie du Sud.